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LE DIABLE AU CORPS.


Je souffrirai des bougreries pareilles dans ma maison… (Plus prompte que l’éclair, elle se saisit d’une aune.) — Tu vas voir beau jeu, petit lien de fagot. — Elle accourt ; le Chanoine confondu veut l’arrêter… Pan ! de la main qu’elle a libre, un soufflet des mieux appuyé sur le mufle de son maître. Il a le nez cassé… Le sang en ruissele. Je suis à mon tour duement auné de trois ou quatre coups… Mais, la colere triomphe de ma confusion ; je me défends, je m’accroche au funeste instrument de mon supplice ; nous nous le disputons avec une égale vigueur : c’est à qui l’arrachera des mains de l’autre… On me rue pour lors un coup de sabot ferré qui, s’il a son effet, ne va pas moins qu’à briser les précieux réservoirs de ma pauvre humanité !…«

LA MARQUISE.

Ouf ! Tu me fais frémir !

HECTOR.

Par bonheur, je cede un peu, et me mets hors de portée ; mais le talon de l’enragée Brigitte, en s’abaissant, tombe dans ma culotte, et ne peut se dégager… Elle sautille sur un seul pied, songe à son équilibre, et me donne, en ce moment, bien de l’avantage… Déja l’aune me reste… Ciel ! qu’il s’en faut bien que j’en fasse usage ! Je vois la mort suspendue sur le chef de ma cruelle ennemie… et je fais un vœu pour elle, en frémissant. Le sournois Chanoine, armé d’une grosse pelle à feu, les bras élevés, va, d’un coup affreux, briser le crâne de sa gouvernante ; c’est, à cet instant