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LE DIABLE AU CORPS.


l’avoir eu pendant quelques mois, seule peut-être, ce qui n’était pas un médiocre triomphe pour ma vanité, j’eus la sottise (c’en était une insigne) de trouver mauvais qu’il n’eut plus pour moi la même ardeur. J’aurais dû me dire qu’un homme qu’on a mis sur les dents ne peut plus se ressembler ; mais j’avais l’injustice de le trouver coupable… Je lui reprochais de ne plus m’aimer ; mon goût était toujours dans toute sa force : il eut beau me jurer qu’il était le même pour moi, je lui dis net que lorsqu’on aimait, et que la Nature devenait avare de moyens de donner du plaisir, on n’hésitait pas d’y suppléer par les ressources de l’art…

LA MARQUISE.

L’exiger était cruauté de ta part ; t’obéir eût été faiblesse de la sienne.

LA COMTESSE.

Aussi parut-il s’y refuser : je pressais vainement ; l’amour-propre se mettant de la partie, nous nous dîmes réciproquement des choses assez désobligeantes, et je crus que nous allions être brouillés.

LA MARQUISE.

Tu le méritais, du moins.

LA COMTESSE.

Soit : voici pourtant comment les choses semblerent prendre une tournure plus favorable à mes desirs. Tournesol vint un jour, avec un air assez serein, me dire que, voulant absolument m’ôter tout soupçon qu’il pût me desirer

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