qu’en conséquence, il n’y avait pas eu moyen d’éviter de passer la nuit avec elle. Qu’à la vérité, par la fraîcheur de ses caresses, elle mériterait un retour sincère de quiconque n’aurait pas de l’amour pour Félicia ; mais que sans les ressources infinies de son heureux âge et l’essor de sa voluptueuse imagination si fraîchement frappée des délices de ma jouissance, il aurait couru de grands risques avec une femme qui s’attendait à des prodiges. Que cependant il avait eu le bonheur de tenir un milieu difficile entre la honte de mal faire et le danger de faire trop bien. Qu’en un mot, il s’était beaucoup ménagé, tant pour pouvoir prendre sa revanche avec moi que pour ne pas accoutumer une femme, qui paraissait très exigeante, à une certaine tenue de complaisances qu’il ne se sentait en état d’avoir que pour moi seule. Tout cela était fort honnête et sans doute vrai ; d’avance, mon amour avait justifié mon aimable infidèle. Je fus transportée de voir que je lui étais toujours aussi chère. Je répondis à ses tendres caresses avec une vivacité qui dissipa toutes ses alarmes. Je me hâtai de lui faire place à mes côtés, et bientôt, épuisant dans mes bras ce dont il avait frustré sa nouvelle conquête, il me fit passer par tous les degrés imaginables du plaisir. Nous nous séparâmes accablés d’une fatigue délicieuse, après nous être promis mutuellement de mettre à profit les moindres moments pour nous livrer à de ravissantes folies dont je connaissais désormais tout le prix.
CHAPITRE XXIX
J’avais cependant un scrupule : d’Aiglemont m’ayant fait de sincères confidences au sujet de Sylvina eût mérité sans