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contre Robert, « comme des injustices qui méritaient la réparation la plus authentique et les plus forts dédommagements ». C’était à ce point que Dupuis voulait amener sa maîtresse. — Madame, dit-il, je ne vois qu’un moyen de dédommager un homme tel que M. Robert, s’il aimait encore madame, après qu’elle aurait attiré sur lui les plus grands malheurs. — Et ce moyen, Dupuis, serait… ? — Ce serait, madame, d’épouser ce gentilhomme ; il est fait, soyez-en sûre, pour prétendre à cet honneur, d’autant plus que milord Sydney… — Que milord Sydney est un ingrat, qui s’est marié pour achever de me faire tout le mal qui dépendait de lui…

Dupuis s’était troublé ; il avait manqué d’effronterie pour soutenir avec assez de vraisemblance un mensonge dont les suites pouvaient devenir de conséquence pour lui. Mme  de Kerlandec commença dès lors à se méfier de ce confident ; puis, ayant fait en secret des recherches exactes, elle découvrit bientôt que je n’étais que la maîtresse de milord Sydney ; que Dupuis avait chez moi de fréquentes habitudes, et que j’avais dans ma maison certain étranger qui, sur le portrait qu’on lui en faisait, pouvait bien être ce Robert lui-même… Elle se souvint d’avoir vu au Luxembourg un homme qui lui ressemblait beaucoup, et qui, en effet, avait paru la remarquer ; et se rappelant encore certain laquais qui l’avait suivie avec affectation jusqu’à son carrosse, il lui sembla que la livrée de ce curieux était la mienne. Ces soupçons devinrent des certitudes, lorsque, ayant congédié Dupuis, qu’elle faisait épier soigneusement, elle s’assura qu’il était rentré à mon service. Dès lors, son inquiétude et sa curiosité crûrent à l’excès, et, brûlant enfin d’être éclaircie, elle m’écrivit la lettre suivante, à l’adresse de milady Sydney, sous enveloppe à Mme  Sylvina :

« Milady, la plus malheureuse des femmes, saisit, il y a quelque temps, un léger prétexte pour aller vous voir et ne vous rencontra point. Aujourd’hui, je vais au fait et vous fais part des motifs qui me faisaient désirer d’avoir l’honneur de vous entretenir. J’avais pris à mon service le