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CHAPITRE IX


Comment tout allait mal cette nuit-là.


— Pourrais-je, belle dame, me dit-il, après qu’un peu de repos et quelques rafraîchissements eurent calmé mes esprits, pourrais-je, sans indiscrétion, vous demander par quelle aventure vous vous trouvez si tard et avec cette parure à la merci d’un cocher de place et d’un polisson. Permettez-moi la liberté de qualifier ainsi l’étourdi qui vous accompagnait.

Cette question me causa beaucoup d’embarras et de confusion. — Vous ne me paraissez pas faite, ajouta-t-il, pour courir la nuit dans un fiacre. Ce riche habillement, ces diamants, tant de charmes et de grâces, tout annonce que vous vous trouvez dans quelque situation extraordinaire. Vous avez sans doute quelque part une voiture, des gens. Ordonnez : mon laquais va courir et… — Non, Monsieur, ma voiture et mes gens sont à la porte du bal de l’Opéra, où j’étais moi-même, et où j’ai laissé ma compagnie. Tout ceci est la suite d’une intrigue de masque. Je n’ai pas dans ce moment l’esprit assez tranquille pour vous faire des détails, qui d’ailleurs seraient peu intéressants pour vous ; mais je vous prie, en attendant, de ne pas porter trop loin vos soupçons sur mon compte et… — Moi des soupçons, Madame ! Vous méprendriez-vous vous-même, et vous paraîtrai-je assez incivil ?

Il parlait avec distraction, les yeux fixés sur une de mes oreilles ; j’y portai ma main : la girandole manquait. Nouveau malheur ! Nous descendîmes promptement, et à l’aide d’une torche que le marquis fît allumer nous retrouvâmes dans la boue ma girandole, mais brisée : une roue avait