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Mon argent était chez un banquier, j’amassais alors… Je fus longtemps entre la vie et la mort. Cependant la nature prit le dessus, j’eus le malheur de me rétablir. »

Le comte paraissait fatigué de parler. Quoique je prisse à ce qu’il me racontait l’intérêt le plus vif, je le priai néanmoins de remettre la suite au lendemain. Il ne me sortit pas de l’esprit pendant la nuit, et dès qu’il fut jour chez lui, j’y courus : il avait assez bien reposé, et je le trouvai en état de me continuer le récit de ses aventures.




CHAPITRE XXXI


Toujours la même histoire.


« Suis-je assez malheureux, Madame, si ce que je vous ai conté jusqu’ici n’est que fleurs en comparaison de ce que vous allez entendre !… Armez-vous de courage.

« Dès que je fus en état de sortir, je me rendis chez Aminte. Mais j’étais remplacé. J’en demandai les raisons ; pendant longtemps on ne voulut m’en donner aucune : à la fin, on me dit que je devais bien savoir pourquoi… J’eus beau prier qu’on me laissât parler à Madame, il n’y eut pas moyen. Je pris enfin la liberté d’écrire. Le beau-père, entre les mains de qui tomba ma lettre, me fit signifier durement par le suisse que si j’osais désormais paraître à la porte de l’hôtel, il me ferait expirer sous le bâton. J’avais trop de fierté pour souffrir patiemment cet outrage, d’autant plus mortifiant que le bilieux portier y mettait du sien par le choix des expressions. Je le régalai lui-même d’une ample volée de coups de canne, accompagnée de quelques apos-