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CHAPITRE XXVI


Suite du précédent.


« Un de mes amis pressentit la dame sur le désir que j’avais de lui faire ma cour. La permission de me présenter fut accordée et le jour pris : c’était celui de certaine assemblée ; nous devions nous rendre une heure avant celle de la coterie, avec qui je me proposais bien de ne pas me rencontrer. Cependant ce grand jour arrivé, quelque affaire imprévue retient mon introducteur, il me fait savoir qu’il ne pourra pas m’accompagner ; mais il me conseille d’aller seul. La dame était prévenue et peu faite d’ailleurs pour qu’un homme comme moi se piquât avec elle d’une bien rigoureuse étiquette. Je pars donc. Il était déjà plus que sombre, je trouve à la porte un valet endimanché, qui me dit que madame est visible ; l’escalier est faiblement éclairé : dans les deux premières pièces, point de lumière et personne ; mais tout est ouvert ; je vois plus loin une femme ; elle m’entend, elle vient au-devant de moi, tenant un flambeau. C’est la maîtresse de la maison, elle-même, se plaignant un peu bourgeoisement de la négligence et de la désertion de ses gens. Ô ciel ! c’est vous, monsieur le chevalier ! que je suis honteuse !… — le pied lui manque en même temps sur le parquet trop soigneusement frotté, elle tombe à la renverse, la bougie s’éteint. Je me précipite, mais quel singulier hasard ! tandis que de la meilleure foi du monde je veux m’empresser à secourir la dame, ma main rencontre une gorge d’une fermeté… ma charité s’oublie. On veut se relever, j’embrasse, on retombe : les ténèbres me rendent entreprenant : la bizarrerie des attitudes me favorise. Je gagne du terrain : une cuisse de satin, potelée, dure, conduit ma main sur le plus délicieux bijou… je l’agace… on crie tout bas : — Ah ! monsieur !…