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fâche. L’autre jour tu m’avais mise dans un état… Tiens : une fille qui accorde, avant le mariage, ce que tu voudrais me ravir, est surement une femme malheureuse… attends… peut-être un mois encore…

Guillot. (montrant quelque chose de fort indécent.) Mais, vois donc, méchante, dans quel état tu me mets à mon tour…

Jannette. (sens se fâcher) D’accord : mais que veux-tu que j’y fasse !… (Guillot lui attire une main sur l’objet.) Fi… cache ta vilenie, cochon…

(Comme en même tems, Jacot parodie cette scène, mais avec un peu plus de succès, car Mlle. Dorothée se laisse tout prendre, et prend aussi, de manière à faire croire qu’elle va permettre quelque chose de plus) Diavolo juge qu’il est tems de se montrer ; mais la Ricanière qui croit n’avoir pas à craindre que Guillot soit heureux avec Jannette, serait bien aise de faire au valet la malice de lui laisser voir, avant l’éclat, Jacot favorisé par leur Dorothée.

Diavolo. Ça, Monsieur ! Qu’attendons-nous donc ? — Qu’ils les ayent enfilées à notre barbe ?

La Ricanière. (avec malice) Un moment encore…

Mais comme le chamaillis entre Guillot et Jannette devient plus vif, et que, tout uniment, Mlle. Dorothée se poste pour être entièrement complaisante, il n’y a plus à différer. Nos faux chasseurs, nos scélérats sortent avec fracas de leur cachette, et tenant aussitôt en joue, avec leur pistolet, les deux galans, ils crient d’un ton effroyable, et à la fois, „ la bourse ou la vie ?… — Jacot fuit, Dorothée s’évanouit : Guillot troublé, mais qui ne perd point la tête, reste, et muet examine avec quelque attention les figures de ses lâches agresseurs

Guillot. Ah ! Voilà justement ce que je craignai ! — Sauve-toi, Jannette, c’est ce coquin de chevalier…

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