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de quelque attentat à leur liberté. Ils sont pourtant innocens, mais ils sont indigens ! C’en est assés pour qu’ils ayent tout à redouter du regard de l’injustice et de la cruauté des gens qui se plaisent à prouver, en faisant du mal, qu’ils peuvent quelque chose

Cazzoné. Qu’est-ce ? Qu’y-a-t-il ? (Plusieurs voix.) Debout, debout tout de suite…

l’Hôte. C’est de la part de Mr. de la Grapinière.

Laura. (se hâtant de se lever.) Nous sommes perdus. Cette maudite fille, que, contre mon avis, tu voulus caresser hier, sert chés le seigneur qu’on nous nomme…

l’Hôte. Debout vous dit-on…

Cazzoné. Un moment… (bas) Hâte toi de deranger l’autre lit… qu’on ne se doute pas… (haut) Vint-on jamais à pareille heure, troubler le repos de ses hôtes…

l’Hôte. Vite, vite : venés comme vous vous trouverés, prendre votre part d’un Dindon qui embaume et du seul vin de Bourgogne qu’il y ait dans la province, excepté le mien.

Cazzoné. (s’habillant.) C’est autre chose ! La bonne fille aura tenu parole à ce qu’il parait.

Laura. (s’habillant) Joliment ! Ce serait bien le mari qui viendrait en personne pour l’affaire en question !

Cazzoné. Il faut voir jusqu’au bout.

Etant enfin en état de se montrer, le couple italien ouvre sa porte ; on le conduit devant l’illustre : déjà la table est couverte. Une soupe à la reine, et une omelette aux fines herbes, de la façon du valet de chambre, complettent avec ce qu’on a déjà cité, un souper