Page:Nerciat - Contes saugrenus, 1799.djvu/54

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 40 )

Monsieur. On m’a rasé ce matin !

Madame. (essuyant sa main avec son mouchoir mouillé d’eau suave.) Vous transpirés comme un rhinocéros ! Ecartés-vous un peu de moi. C’est de vous que partait une vapeur qui rendait ma respiration difficile… Demeurés à deux pas de moi, je vous prie.

Monsieur. (à part) Il ne faut pas la contrarier. (il se rend à deux pas. Haut.) Cette connaissance, Madame ?

Madame. Il s’agit d’un jeune virtuose, tout frais arrivé de Naples…

Monsieur. D’un Castrat, Madame ?

Madame. Eh non, Monsieur ! (elle a beaucoup d’humeur) Que ferais-je d’un Castrat, s’il vous plait ?

Monsieur. Pardon, mon cœur !…

Madame. Mon cœur !… Il est joli celui-là ! Pensés-vous parler peut-être à ma femme de chambre, ou croyés-vous causer ici avec quelques-uns de vos protégés aux petites entrées !

Monsieur. Là là, Madame, pour l’essor d’une expression familière, qui doit vous prouver bien naturellement l’excès de mon amour…

Madame. Vous-avés donc entrepris de me donner ici la comédie ?

Monsieur. Mon Dieu ! Je ne sais ce que je dis… Pardon — Si bien que votre nouvelle connaissance arrive de Naples ?

Madame. Oui, Monsieur ? c’est un jeune Ténor, beau de visage, comme un séraphin, bâti comme l’Antinous, et qui chante…

Monsieur.