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LE CRIME D’UN PÈRE

LA VIE CANADIENNE

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LA CRITIQUE DES LIVRES

Antoine Gérin-Lajoie

Par Louvigny de Montigny

Antoine Gérin-Lajoie, que publiait il a déjà quelque temps Louigny de Montigny, directeur des services de traduction au Sénat, officier d’académie, chevalier de la Légion d’honneur, représentant de la Société des Gens de Lettres de France et des Auteurs dramatiques, membre du bureau d’administration de l’Association des auteurs canadiens, et possesseur de nombreux autres titres honorifiques, est une précieuse contribution à la collection des Créateurs de la littérature canadienne (Makers of Canadian Literature). Victor Morin, l’éditeur associé, a préfacé l’ouvrage en des termes élogieux et heureux. Il dit que l’auteur, propagandiste acharné qui s’emploi à faire aimer et à perfectionner le verbe français en Canada, n’a guère laissé rouiller sa plume pendant les dernières vingt années, et qu’on n’aurait pu confier à meilleure compétence le soin d’apprécier l’oeuvre de l’auteur de “Jean Rivard”.

Louvigny de Montigny n’est certes plus un débutant. Il a écrit des oeuvres remarquable, entr’autres “La Langue française au Canada’’, qui restera encore longtemps la seule autorité sérieuse du genre avec les “Zigzags” de M. Géoffrion. Il a donné au théâtre “Les Boules de Neige”, “La Cabane à sucre”, “Je vous aime”, etc. . . Antoine Gérin-Lajoie n’est pas un essai très substantiel : il ne devait pas l’être pour figurer dans la série des Créateurs de la littérature canadienne. Marchant sur des voies toutes et longuement tracées par les Casgrain, les Suite, les David, les Gérin, les Roy et plusieurs autres, il n’v avait lieu, donc, que de brosser brièvement la biographie de Gérin-Lajoie et de s’arrêter, par contre, à la critique de son oeuvre. Louvigny de Montigny a pleinement accompli ce travail, avec une facilité de langage, un vocabulaire riche d’expressions autant que recherché et varié et une profondeur d’analyse digne d’un Faguet ou d’un Lemaître.

Le volume se divise en quatre parties distinctes : biographie, anthologie d’etxraits en vers et en prose, critique de l’oeuvre et bibliographie des principaux ouvrages de Gérin-Lajoie. La série des Créateurs de la littérature canadienne ainsi conçue fait ressortir la valeur et la somme de travail accomplie par nos principaux précurseurs littéraires. La mémoire de Gérin-Lajoie ne saurait périr. Si jamais les couplets de son “Canadien Errant” tombent en oubli, a dit quelque part Benjamin Suite, le Canada ne sera plus une terre nationale pour les Canadiens errants de partout. “Jean Rivard”, écrit uniquement pour la classe agricole, a fait les délices des gens instruits. Il est nécessaire, pour bien comprendre la portée rénovatrice et sociale de ce petit livre, qui n’est pas un roman à proprement parler, de lire l’étude de Louvigny de Montigny. “Jean Rivard ”, dit-il, est incontestablement le roman le plus recommandable de notre littérature, par l’attachement au sol nourricier qu’il suggère en en montrant la récompense, par l’évocation de nos traditions religieuses et provinciales, par l’exaltation des ressources et des satisfactions que procure l’état d’agriculteur, enfin par l’enseignement social qu’il comporte et le programme économique qu’il énonce. L’auteur est un animateur... ; en tout et partout il s’efforce de stimuler les énergies”.

“Jean Rivard” prêche aussi le retour au pays. Il fut écrit à une époque lamentable, où les nôtres émigraient en masse aux Etats-Unis. Il ne laisse pas comprendre que Gérin-Lajoie a été annexionniste, et Louvigny de Montigny n’a pas cru devoir amorcer ce sujet. Devenu employé du gouvernement, Gérin-Lajoie ne pouvait pas exprimer ouvertement son enthousiasme pour les Etats voi¬