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PREMIÈRE PARTIE

I

L’ATTAQUE DU 22e


Le bombardement dure depuis des heures, enragé, infernal. En première ligne, les hommes sont terrés dans une sécurité relative ; les obus, pour la plupart venant de batteries alliées, vont éclater au loin.

On sait ce que ça veut dire : c’est la préparation d’une offensive. La veille, des avions de reconnaissance ont circulé très bas, insensibles aux projectiles, mais en repérant soigneusement l’origine.

Dès minuit, les canons ont commencé leur concert, martelant les lignes ennemies, là où se sont révélées les mitrailleuses, là où des batteries de campagne ont été démasquées.

On se demande comment les nôtres peuvent envoyer tant d’obus sans craindre d’en manquer. On se demande aussi, et cela réconforte un peu, s’il peut rester des êtres vivants dans les tranchées ennemies.

Tous les ordres ont été minutieusement donnés à l’avance, mais on ignore l’heure de l’attaque. Elle est mentionnée comme l’heure N. à partir de laquelle chacun sait ce qu’il devra tenter, mais l’heure N est connue d’un seul cerveau, le chef suprême. À son signal, les fusées s’élèveront et l’attaque se déclenchera, chacun exécutant les instructions qu’il a reçues.

Pour la Nième Compagnie, la mission est simple et terrible : s’emparer d’un nid de mitrailleuses, en tuer les occupants et tourner les machines contre l’ennemi.

S’emparer d’un nid de mitrailleuses, ce n’est pas se battre, c’est marcher sous la pluie des balles. Les hommes tombent, par rangées, fauchés comme des blés ; ceux qui sont encore de-