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clination ; toujours il vous a défendu, parce qu’il a été à portée de connoître vos bonnes intentions & votre amour pour votre peuple. Il lui ſuffira que vous ſoyez malheureux, pour qu’il s’empreſſe de revenir à votre voix. Il y a quelque choſe de bien plus touchant à partager les malheurs d’un grand Roi, qu’à partager ſes faveurs. Quand on aime bien, les mauvais traitemens ne ſauroient affoiblir l’amour. Sully n’en aimoit pas moins Henri IV, bien qu’il en fût fort ſouvent mal mené. C’eſt à cela qu’on reconnoît les fideles ſerviteurs. Ils ſavent bien diſtinguer les impulſions étrangères d’avec les ſentimens de leurs Maîtres. Ils ne ſe trompent point à ce qui eſt l’effet de l’intrigue & de la cabale ; ils n’en veulent qu’aux intrigans & aux cabaleurs. Les bons ſerviteurs donnent leur vie pour leurs Maîtres, comme un enfant pour ſon pere, comme tout ſujet doit le faire pour ſon Roi ; & quelque danger qu’il y ait pour M. de Calonne à revenir, il ſera jaloux de vous prouver qu’il vous aime juſqu’au dévouement, & qu’il vous eſt fidele juſqu’à la mort.

Le Roi.Le Clergé, la Nobleſſe, les Parlemens ne l’aimoient pas. Les créanciers ne verront revenir qu’avec peine un Miniſtre prodigue.