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professeur, la liberté des travaux de son choix ne se portait pas sur des terrains ameublis et préparés pour la moisson ; il lui fallait des landes et des forêts sauvages à défricher.

Observons que pour lui s’effaçaient les différences de pays et de nations dans le domaine de la science; il n’y voyait que le patrimoine universel et indivis du genre humain, et il s’abstenait d’entreprendre ce qui lui paraissait bien entrepris ailleurs, soit par un sentiment de délicatesse à l’égard des personnes, soit pour éviter, dans l’intérêt commun, un double emploi des forces.

C’est ce qui détermina plus tard, lorsqu’il eut à choisir le sujet d’une publication sous les auspices du gouvernement, sa préférence pour un des Pouranas, à l’exclusion des Védas. Il n’était pas possible que l’Imprimerie impériale ne demandât pas à l’illustre professeur de sanscrit la traduction d’un ouvrage pour sa splendide collection orientale. Des savants d’Allemagne et d’Italie avaient commencé ou annonçaient les éditions traduites des principaux monuments de la littérature sacrée de l’Inde : tranquille de ce côté, il prit pour lui la part la plus humble et la plus fastidieuse, le Bhâgavata-Pourana, et il la traita comme si elle eût été la plus magnifique. L’exécution la rendit telle en effet.

L’école anglaise de Calcutta suivait et remplissait son sillon, depuis longtemps tracé, d’interprétation littérale et de grammaire pratique. D’autre part, s’était élevée depuis quinze ans l’école allemande de philologie comparative et de grammaire appliquée à l’anthropologie et à l’histoire. Guillaume Schlegel, Guillaume de Humboldt, M. Bopp, M. Lassen, avaient inauguré cette méthode nouvelle, où s’alliaient la critique et la philosophie, pour retrouver à travers les lieux et les siècles