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liers. Les bonnes grammaires font les bonnes études, moins par la leçon que les enfants y apprennent eux-mêmes que par les directions qu’elles impriment à l’enseignement.

Ici, l’importance de la réforme opérée par un livre ne se mesure pas tant à la grandeur de la doctrine qu’il renferme qu’à l’étendue de l’action qu’il exerce et au nombre de ceux qui en reçoivent le bienfait. Plus de cinquante éditions (à combien de milliers d’exemplaires !) ont été épuisées en moins de quarante ans. Il est vrai que le livre s’adresse à des lecteurs qui en font une active consommation ; non pas qu’ils se plaisent, selon le précepte du poète, à le feuilleter nuit et jour ; mais c’est qu’ils le ménagent en proportion seulement de l’amour qu’ils lui portent. Ingrats aujourd’hui, leur reconnaissance n’est que différée. Quoique nous soyons bien loin du temps où l’on embrassait les savants pour l’amour du grec, et qu’il y ait encore des gens qui l’embrasseraient volontiers pour l’étouffer, Homère et Virgile, Démosthène et Cicéron, Thucydide et Tacite, et tous les immortels génies de l’antiquité classique, demeurent et demeureront encore longtemps, il faut l’espérer, la base de l’éducation libérale, comme le type avoué du grandiose et du beau chez les nations civilisées ; et tant que ces dieux auront chez nous des autels, c’est M. Burnouf que les jeunes initiés rencontreront à l’entrée du temple, et qui leur en ouvrira les portes.

Dans le petit volume d’un simple manuel d’école se résolvait une grande question d’éducation générale, d’entendement humain, de morale. Peut-on traiter l’enfance comme une matière plus ou moins ductile, sur laquelle des empreintes de règles et de formules souvent fautives s’inculquent successivement par l’effort réitéré