CETTE LAGUNE
Pour H.T.
Cette lagune d’absinthe et son passeur noir,
Si loin que tout s’éclaire d’un jour de songe,
Ce miroir trouble où de l’or pâle fait des moires
Sur les fantômes des palmes élongées,...
Ce souvenir est-il de cette vie ?
(Une étrangeté si élégiaque imprégnait l’air)...
Ou d’une autre existence incroyablement vieille ?...
...Je sais que de grands vols criards passaient, alertes,
Des vols d’oiseaux de formes jamais retrouvées;
Qu’à terre croissaient des fleurs nacrées, gigantesques,
Dont les parfums trop vivants énervaient,
Instillaient une inquiétude si complexe,
Une inquiétude un peu douloureuse mais exquise.
Et, sur l’eau verte, filaient, penchés, des navires
Tout blancs d’une lourde et haute neige de voiles
Vers une passe lointaine, voilée
De grandes gazes d’opale et de saphir...
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