Page:Nau - Force ennemie.djvu/321

Cette page a été validée par deux contributeurs.

guer une flore : j’aperçois comme de grands bois dont les arbres ne sont que des fleurs ; rien que des pétales, des corolles, des calices embaumés, bercés par une brise qui est, elle-même, un parfum distinct des émanations florales, — mais également suave. Toutes les nuances du rose parent ces gigantesques bouquets fluctuants ; certains de ces roses, d’un rose de lèvres de brune, sont si incroyablement « émotionnants » et « voluptueux », — si je puis parler ainsi, — que j’ai l’impression qu’ils me font une âme neuve. Souvent une fleur se dresse seule, aussi grande qu’un arbre, — et d’une forme si divine, d’une senteur si « enlaçante » — c’est le seul mot qui rende (un peu ridiculement) ce que je ressens, — que l’air jouant autour d’elle tuerait de trop grand bonheur un être humain normal. Désincarné, je puis la respirer impunément, — et même, éperdu de joie, me fondre en quelque sorte en son enivrant nuage incarnadin. — De grands oiseaux prismatiques volent entre les cimes des arbres-fleurs où ils se posent parfois comme des caresses de lumière. Leur chant aux notes lentes évoque de magiques passés plus charmeurs encore que ce splendide présent. Le ciel est rose et or. Des sources roses traversées d’éclairs d’or fluent, — dont la musique ne se peut comparer qu’à celle de harpes qui auraient, — absurdement — des cordes de cristal, — et, allons plus loin dans l’absurdité : de cristal vivant. — Toute cette nature est comme « nimbée » — et pénétrée en même temps, — de