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confonds tout, à présent. Il y a, pour moi, des semaines qui durent des siècles et des mois qui filent comme des journées. Je me suis trompé de six mois dans mes calculs ! Et qu’ai-je appris encore ? Irène est malheureuse comme je le craignais. Que faire ? Ah ! je vais l’enlever, décidément ! Il n’y a pas d’autre solution.

Julien se lève, allume un cigare, prend son chapeau, ses gants et sa canne et me conduit à un grand magasin où je me redéguise en demi-civilisé. Puis nous flânons une heure ou deux en compagnie d’un Suédois, d’un Japonais et enfin d’un Bulgare qui sont, paraît-il, les trois seuls vrais Parisiens que l’on puisse rencontrer aujourd’hui, entre le Faubourg Montmartre et le Rond-Point des Champs-Élysées.

Je commence à désespérer de m’échapper. Il n’y a pas de foule. Pas le moindre embarras de voitures. Les passages sont relativement déserts.

Vers cinq heures, Julien me déclare qu’il est bien tard pour gagner la rive gauche, — que nous irons demain, — et qu’il doit aller prendre des nouvelles d’un ami gravement malade, rue de la Boëtie : nous ne ferons qu’entrer et sortir.

Quand nous arrivons chez le prétendu moribond, un domestique nous annonce que « Monsieur » a pu se lever. Mon frère, rayonnant, change encore son fusil d’épaule et demande à voir son ami. On nous introduit dans une sorte de bibliothèque où nous trouvons le convalescent et une trop nom-