Page:Nau - Force ennemie.djvu/120

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Ah ! mon Dieu ! je suis hideuse ! Je ne veux plus qu’on me voie ! Oh ! c’est mal de me regarder comme cela ! Je veux me cacher ! Oh !… surtout… celui qui va me délivrer… qu’il ne me voie pas… je le perdrais ! Le seul ami, le seul !… Par pitié, allez-vous en !

— Le mieux est de la laisser un instant, acquiesce le Dr  Froin.

Après ce qu’elle vient de dire — (est-ce de moi qu’elle a parlé ? Suis-je l’ami qui doit la délivrer ? Ou a-t-elle imaginé quelque bizarre chevalier qu’elle croit rencontrer partout ?… peu importe !) je trouverais cruel d’épier son désespoir, même à son insu. Je reviendrai plus tard, je lui donnerai le temps de se remettre complètement.

Et tandis que l’infirmière qui suit le Docteur ouvre et referme la porte, je sors de la chambre, sans y penser, au travers du mur ; car il n’y a plus pour moi d’obstacles matériels. Je me laisse aller, flottant au hasard… et me voici déjà loin de Vassetot. Une liberté si absolue m’effare ; — je ne sais qu’en faire.

Je sens, pourtant, que si je n’étais pas aussi abominablement triste, si j’avais la moindre énergie « spirituelle », rien ne me serait plus facile que de gagner, en un espace de temps incroyablement court les beaux pays que j’ai toujours désiré voir, que de planer au-dessus d’Océans d’un bleu lumineux vers des baies cernées de palmes et de forêts fleuries. Mais, tout aux souffrances d’Irène, je ne