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sement satisfaite et préoccupée, les yeux clignés, la langue tirée, que je suis tout près d’éclater de rire.

Mais le souvenir de ma stupide conduite me revient tout à coup et me donne un terrible coup au cœur. Ah ! j’ai bien su profiter des bonnes dispositions du Dr  Froin ! C’est au moment précis où l’excellent homme commençait à me croire guéri que m’a envahi ma grotesque hantise et que j’ai inauguré la série de mes nouveaux exercices ! Triple brute que je suis ! Ne pouvais-je me sentir atteint de ce genre inattendu de folie, en souffrir, en être épouvanté, sans pour cela devenir imbécile et perdre tout pouvoir de dissimulation !

Mais c’est toujours la même histoire ! Je le vois bien — et par les observations du Dr  Magne et par d’autres que j’ai faites moi-même. Le fou raisonnant ou demi-raisonnant, qui n’a que des crises passagères, se sentira parfaitement sur le point de commettre quelque sottise irréparable, se tiendra à quatre pour « s’empêcher » d’agir… ou de déblatérer et se verra commettre la sottise, s’entendra dire la chose à ne pas dire… Il n’y pourra rien. Il sera victime de cette « force ennemie » dont parlait Mabire.

Je suis douloureusement curieux de connaître l’impression que j’ai pu produire sur le Dr  Froin. Je tousse, je remue, j’écarte avec une brusquerie voulue la couverture qui m’étouffe, — bruits avertisseurs, — puis j’appelle — pas bien fort :

— Léonard !