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— « Vous avez fini dans le chaos ? Eh bien, les séparatistes de M. Chaput, au contraire, commencent dans le chaos. Où donc iront-ils finir ? »

— « C’est justement là ce qui m’amuse ! »

— « Pour en revenir à votre grande crise de séparatisme, vous avez obtenu un succès bœuf, soit dit sans vouloir t’offenser, mon vieux. »

— « On tâche de se consoler, en se disant qu’on a son petit état souverain, ses institutions, sa langue et ses droits, comme le rêve de M. Chaput ! »

— « Oui, parlons-en ! Tout cela vous fait, comme on dit, une belle jambe ! Puisque votre mouvement a si piètrement mal tourné, as-tu parfois le désir de changer d’opinion ? »

— « Mon pauvre vieux, demande-toi donc si Daniel Johnson a l’idée de changer d’opinion, depuis que son parti a été anéanti aux élections. »

— « Ce n’est pas la même chose. Johnson s’obstine à vouloir ressusciter un cadavre en complète décomposition. »

— « Je n’aurais pas osé te l’avouer !… Quant à moi, j’essaie de me dire que je ne suis pas aussi noir qu’on le prétend. Il m’arrive même parfois de m’entendre dire que je suis un bon diable. Du reste, le pire d’entre nous finit par faire le bien, même sans le vouloir… Tu n’as pas l’air de me croire. »

— « C’est que c’est dur à avaler ! »

— « Pourtant, mon vieux, regarde agir les humains autour de toi. Ne vois-tu pas que, pour un bon nombre de catholiques, la peur du diable est le commencement de la sagesse ? Tu vois, cela peut me servir de consolation ! »

— « Tu ne parviendras pas à me convaincre !