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du commandant et de Langelle ? Bon Dieu ! qu’il fait froid ; n’êtes-vous pas gelé, Résort ?

— Pas tout à fait ; cependant, après deux hivers dans la mer des Indes, le froid m’éprouve aussi ; mais ce ne sera pas long, vous savez, quelques jours à peine ! Une fois les parages du Portugal dépassés, nous aurons chaud.

— Oui, compter les jours et désirer le lendemain, la vie des marins se passe ainsi. Ah ! j’en ai bien assez de ce métier-là. »

L’enseigne arpente la dunette en tapant ses pieds pour les réchauffer.

Ferdinand va et vient de l’arrière à l’avant, les mains dans ses poches, il parle à quelques hommes, leur transmettant aussi un ordre de l’officier. Les cordages et les voiles battent contre les mâts, les poulies grincent, la lune brille rarement, parce que les nuages gagnent en étendue et en vitesse.

« Résort, allez donc consulter le baromètre. »

Un homme apporte un fanal.

« L’aiguille descend d’une manière folle, s’écrie Ferdinand.

— Eh bien, ce sera gentil dans le golfe de Gascogne, une deuxième édition de la Minerve… Ah ! Dieu merci ! quatre heures piquent, allons, descendons ; mais le roulis va s’établir, et vous verrez qu’on ne pourra même pas dormir. »

Ferdinand sourit, lui sait-bien qu’il dormira, et, après avoir franchi quatre à quatre l’échelle de l’avant, il traverse vite le faux pont, calfeutré à cause du mauvais temps, et où l’air est très épais. Il gagne ensuite le poste des élèves, un peu écœuré à cause de cette atmosphère lourde répandue autour de lui ; et, à son tour, il grimpe dans son hamac et s’endort promptement, malgré le roulis qui le berce rudement. Derrière cette muraille en bois, les lames se heurtent avec un bruit sourd.