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LES AMOUREUX DE LA FORÊT

Après une sauterie de bambins, ils s’assoient dans la mousse et boivent à longues gorgées, tour à tour. Les arbres sont immobiles. Les nids, débordant de plumes, de becs et d’ailes, s’endorment. Mademoiselle Valade joue avec une tige de foin d’odeur, qu’elle hache ensuite entre ses dents. Le charme de cette nuit, en un printemps ivre de sève, trouble ces deux êtres sains. Les paroles se figent aux lèvres. Ils s’étudient et s’admirent en silence.

Puis, Ernestine se lève. Un rayon de lune saute dans ses cheveux lourds. Doucement elle murmure.

— On va rentrer. Vous n’avez pu soif… Et j’ai peur de je n’sais pas quoi…

— Rentrons, la d’moiselle. La fraîche, voyez-vous, a commence à s’coller sus vos épaules. Et puis, ça sent trop bon, dans la brousse…

— Oui, Mussieu… Mais dites-moé donc… Allez-vous être ben longtemps parti ?

— J’ai d’l’ouvrage pour deux mois, mais j’tâcherai de v’nir un de ces dimanches. Cela vous fait rien, que j’vienne ?

— Oh ! non… non… s’écrie l’enfant, toute surprise de l’émotion qui l’étreint. Elle ajoute, en brisant une pousse de rosier sauvage, sans prendre garde aux épines :

— J’aimerai ça, vous r’voir. On ira en ca-