Page:Nantel - À la hache, 1932.djvu/78

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
76
À LA HACHE

Un troisième déclare avoir envie de se remarier. Son voisin de couchette s’écrie, oubliant le silence traditionnel du soir.

— T’es pas fou, Désiré… À 65 ans… c’est ben trop jeune pour faire un mort.

Et le compagnon de Désiré lui donne un vigoureux coup de coude dans le ventre.

Tiffault grogne.

— Lâchez donc les femelles, vous autres. C’est l’temps d’dormir…

Plus rien…

***

Les deux L’Épicier, père et fils, n’ont pas manqué de faire un tour de pêche, flânant dans la baie d’abord, afin de jouir un peu des minutes glorieuses du couchant, déjà loin. La lumière du jour s’est endormie graduellement, sous l’aile élastique de la nuit.

Leur canot tourne doucement la pointe de la digue. Un chevreuil continue à mordiller les bourgeons épanouis d’un jeune tremble, aux feuilles rondes comme des gros sous, dansant une farandole argentée, et secouant vers le sol des couleurs volées à la dernière lune.

Le vieux forgeron admire son fils.

Tous deux sautent à terre. Les chiens de Valade hurlent avidement. La porte du chantier