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L’ÎLE VALADE

Le sable est chaud. Ses pieds enfoncent dans cette douceur. L’eau l’invite. Sans hésitation, ignorant même que c’est mal d’être nue, Ernestine se précipite dans l’onde fraîche. Elle nage vigoureusement, plonge et se plaît à battre la surface avec ses mains, ses jambes, car les gouttes se transforment, au-dessus de son corps, en perles dorées par la baguette des rayons lunaires.

Une lune infirme se courbe là-haut. Qui donc l’a défigurée ainsi ? La fillette observe. Une idée folle la traverse. Vite sur le bon sable, bruni par l’ombre. Puis, après avoir attendu que le miroir du lac ait fait disparaître les blessures de ses ébats, l’enfant se couche en rond, essayant d’imiter la demi-lune, tombée tout près, sur la surface. Non… ça ne va pas. Le corps roule jusqu’à l’eau. La fille des bois reprend sa pose, se recouche, colle les bras sur ses hanches. Enfin la chair rosée forme un croissant, reflété par le cristal de Dieu.

Un rire d’oiseau monte en chantant. Une voix heureuse s’écrie, au grand scandale des hiboux :

— Y a quatre lunes !… quatre lunes… Une dans le ciel… une sur le sable et deux, oui, deux… deux… flottant avec l’eau !…

Après une longue rêverie à écouter le gla-