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L’ÎLE VALADE

à l’étranger, me dit l’inconnue, au timbre frais et bon.

Ernestine Valade me désigne le canot.

— Prenez place au milieu et étendez-vous dans l’fond.

Regardant ensuite le chien à poils gris :

— Toé, Carlo, à la nage, pour revenir chez nous…

Je veux protester. Elle me répond, souriante :

— Y peut ben nager… C’est un vrai poisson… Lui pis moé, on traverse souvent la baie, en face de notre île. Ça fait deux bons milles. Et j’aime ça, l’eau qui vous caresse partout.

Je regarde, surpris, cette fille de la nature. Son regard fixe le mien comme un regard de sœur, ouvert et franc. Toute sa personne dénote une âme saine et pure, dans un corps nerveux.

Elle pousse l’embarcation et saute à l’intérieur, sans que l’équilibre en soit même affecté.

Une gêne, une vénération presque, m’empêche de causer. À deux pas de moi, se trouve une vierge n’ayant pas même un soupçon de désir dans sa belle chair. Elle est à genoux, écrasée à la façon indienne. Ses bras nus allient leur rythme aux mouvements de l’aviron. Une culotte de serge noire se moule aux cuisses parfaites. La blouse blanche me paraît trop étroite