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SCÈNES D’HIVER

naires, le lac vient briser son plateau de verre taillé, sur le tout.

Ô nature, ô nuit de ma province !

Combien l’homme se sent petit, devant un tel spectacle. Son cœur bat avec plus de force. Il fait mal. On entend les coups, dans la poitrine, unissant leurs attaques aux bruits des arbres ouverts par le froid. Cette plainte qui domine et la nuit et la brousse…

Appel éperdu d’amour, dans la sublimité des heures silencieuses, où Dieu montre à la terre, en dormant, une poussière de son manteau…

Oui ! en face de tout cela, il est facile d’entrevoir l’éternité…

Un renard glapit. Un hibou houhoule.

Dans une poutre, un ver ronge. Le vent s’éveille. L’aube saigne. Ma fournaise chante… Je prie…

***

Enfin le soleil se risque. Il a tellement froid que sa respiration jette des frimas sur le monde et qu’il cache ses oreilles dans une ouate de radium. Ses rayons même sont figés.

Mes chiens sont revenus. Ils dorment, tachés de sang. Un déjeuner de Gargantua achève d’éveiller tout le monde. Et qu’on le permette, moi aussi…