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SCÈNES D’HIVER

Rompu, gelé, morveux, n’ayant pas l’habitude de patauger dans la neige aux épaules, je m’écrase sur un cèdre penché, vert comme jamais. Des écureuils m’offrent leurs sympathies. Une pie vient voir si j’ai des douceurs. La polissonne secoue une branche, en sautant. La poudre blanche me tombe dans le cou… Oh ! c’est froid… Ce qui n’empêche le grand calme des bois, argentés de lumière et de givre, de me faire aimer davantage cette glorieuse nature : hommes, monts, ronces et fauves.

Je regarde passer les deux traîneaux, arrivant chargés d’hommes. Ils chantent, satisfaits, eux aussi, de leur sort.

Après leur disparition, je me hasarde sur la route nouvelle. Une trace y commence à durcir, large et belle. Les pelleteurs arrivent, nivelant, ici, là.

L’un d’eux, après avoir craché une chique qui troue la neige, me déclare :

— Hein, l’commis, on te l’déviarge, le ch’min, nous autres.

Après une nuit de gel, le fond sera plus solide. Et demain, à l’aurore, la puissante charrue, traînée par six chevaux, entrera en scène.

En attendant, descente du rideau. Allons dormir. Intermède pour les étoiles…