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AU LAC CLAIR

seuls, trois rangs d’écorce nous permettent d’admirer le soir qui naît. La vie continue, intense, autour de nous. Et, dans les brousses voisines, les appels des renards intensifient davantage l’hymne de beauté, au milieu de la forêt laurentienne.

Nous côtoyons l’île Valade. Un chasseur de ce nom y habite depuis un quart de siècle.

Dans la passe, entre les grand et petit lacs Clair, l’eau est lisse comme une chevelure de femme. Les rives, blanches, de glaise pure, imitent de la chair. Et les vagues créées par notre esquif vont clapoter des étreintes sur les racines des pins.

Des castors battent la surface de leurs queues. On croirait entendre des coups de fusil, que l’écho se renvoie en jouant à la balle.

Mon compagnon modère la vitesse du canot. Il jette sa ligne. La cuillère brille, en étoile filante, et descend dans l’onde. La corde de soie glisse, glisse, attirée par les profondeurs, et imite un long vermicelle, dans la nuit devenue bleue.

L’odeur des fougères flotte, pénétrante. Des grenouilles annoncent l’heure d’amour, avec leurs gosiers ronds. Les étoiles distraites échappent leurs rubis dans le miroir du lac. C’est la