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CORVÉES D’ÉTÉ

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Déjeuner exquis. Trois convives : L’Épicier, Laurence et Philippe Dulac, sont arrivés de Saint-Michel avec le courrier et un chargement d’avoine. Premiers préparatifs des entreprises d’automne.

Menu royal. Le cuisinier nous pose un lapin, là, dans un épais ragoût. Nourriture hybride, car un lièvre accompagnait son frère blanc, au supplice du chaudron.

Dos au poêle, l’équarrisseur mange avec béatitude. Tout est bon d’ailleurs, à celui qui possède une conscience pure.

Les glands de laine de sa blague à tabac lui pendent sur la fesse. Des pommettes safran. Une petite chatte au front noir, tel un masque, à ventre crème et dos souple, saute et grippe les boules de linge. Un brin de vent les fait osciller davantage. Minette saute plus haut, manque son but et s’accroche à l’échine courbée du mangeur. Il proteste.

— Cré gué ! en v’la des manières. C’est-y-pas mal élevé de m’prendre pour ane souris, à mon âge ?…

L’Épicier s’étouffe en mordant un bout de cuisse. Il me regarde, ferme un œil et remarque :