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LA DESCENTE DES BILLOTS

Commis.

Je rouvre la digue du lac Croche à soir. A va barder… Seize pieds de tête d’eau. Avartissez Boischer, Desrosiers et L’Épicier. Leur eau à s’ra bonne dans 12 heures. J’vous invit’ à v’nir voir ça. Montez avec Dulac.

Et j’signe mon nom,
Fardina Boisverre.


Les vivres sont chargées. Un seau d’eau à la Grise, qui en gaspille la moitié en soufflant des bulles sur ma chemise, et nous partons.

Nouvelle traverse du gué. Le courant lèche encore les essieux, dédaigne leur graisse noirâtre, mais gratte la poussière, qui roule en taches sinueuses mêlées aux vagues.

Cinq milles de trajet au milieu des sapinages et des perdreaux. Trois milles dans un jeune bois de cyprès, hauts comme des femmes en crinolines. Sur le sol, des touffes de bleuets attendent août pour tourner au bleu. Un saut de la jument fait suivre voiture et promeneurs par dessus une ornière. La Grise va, gourmande, lentement. À droite, à gauche, comme des pinces d’ivoire, ses dents coupent et tirent la pousse d’un érable, la fleur du trèfle, sortie là, dans la mousse, entre deux cailloux.