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moins le passage est exact, aux animaux seulement les habitants de l’Arménie attachaient des sacs. Les Toungouses et plusieurs autres peuplades polaires emploient encore le même procédé pour préserver les pattes des chiens qui tirent leurs traîneaux. Après cela on a fixé aux pieds des lamelles de bois, et, pour faciliter la marche, ces lamelles ont été choisies longues.

Les perfectionnements ont pu être obtenus suivant deux méthodes différentes. On a passé des lamelles de bois aux appareils en osier, comme ceux décrits par Arrianos, et l’on a obtenu les raquettes dont l’usage s’est ensuite répandu dans les régions les plus diverses, à moins que dans ces différents pays les habitants n’aient su en imaginer de semblables, ou bien on a recouvert les lamelles de peaux pour les rendre plus résistantes. Ces lamelles pouvaient être garnies de pointes pour éviter de glisser sur les pentes escarpées. Dans les plaines, il est au contraire avantageux que les raquettes glissent facilement, et pour obtenir ce résultat on les a recouvertes de peau : Strabon signale des patins de ce genre chez les populations du Caucase. Aujourd’hui les Indiens d’Amérique placent un morceau de peau sous leurs raquettes lorsqu’ils doivent descendre un monticule. Le nom eskimo des ski signifie mot à mot : peau pour glisser (les indigènes du Grönland emploient presque toujours des patins garnis en dessous de peau).

Du jour où l’on a essayé de faire glisser les raquettes, elles ont été transformées en ski.

Pour appuyer cette hypothèse sur l’origine de nos patins, examinons maintenant s’il existe encore des ski qui, par leur largeur et leur défaut de longueur, rappellent la forme des raquettes.

En Sibérie, à mesure qu’on avance vers l’est, m’écrit le capitaine A. Jacobsen, les patins sont de plus en plus courts, et augmentent de largeur. À l’extrémité de l’ancien continent, ceux des Goldes et des Ghiliaks mesurent seulement de 1 m. 40 à 1 m. 60 de long et une largeur de 16 centimètres[1]. La proportion de la longueur à la largeur est dans le rapport de 9 à 1.

  1. Au Musée ethnographique de Berlin figurent des ski des Goldes. Ils ont une longueur de 1 m. 45 et une largeur de 16 centimètres, sont en bois de pin et garnis de peau de renne. Ils présentent une courbure légère en avant, et peu accusée à l’arrière.