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leur embarcation. Ils se mirent au travail, aidés par quelques Grönlandais et Grönlandaises. Le payement de ces ouvrières consiste, soit dit en passant, en rations de café, dont le nombre varie d’après la fortune du kayakman. Pour un pareil travail, les pauvres ne payent souvent que 35 centimes. Balto fut plus prudent la seconde fois qu’il se hasarda en kayak. Il n’eut garde d’attacher des flotteurs à son embarcation et put ainsi éviter tout accident. Kristiansen se montra au contraire téméraire : le premier jour il se risqua en pleine mer sans l’aide d’aucun flotteur et se tira merveilleusement d’affaires.


eskimo en kayak. (dessin d’a. bloch.

Peu à peu tous les membres de l’expédition devinrent des kayakmen, à l’exception, bien entendu, du vieux Ravna, et au printemps nous passions souvent nos journées à chasser les oiseaux dans ces embarcations.

En hiver, les phoques sont rares sur la côte occidentale du Grönland, et la chasse de cet animal n’est guère rémunératrice à cette époque de l’année. Nous poursuivîmes surtout les oiseaux, principalement les eiders. Au commencement de l’hiver ces palmipèdes passent en bandes plus ou moins nombreuses le long des rives des fjords. Embusqué derrière un promontoire, il est alors facile d’en tuer un certain nombre au passage. Dans cette chasse les Eskimos font preuve d’une merveilleuse adresse : à chaque coup ils abattent l’oiseau qu’ils visent, et manient leur embarcation avec une dextérité étonnante.