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NAVIGATION EN BACHOT.

ensuite dans la soupe ; de ma vie je n’ai rien mangé de plus délicat. » Les oiseaux cuits, nous les déchiquetons à belles dents ; en quelques instants il ne reste plus rien du premier : la tête, les pattes, tout a disparu. Le second, nous le mangeons lentement, pour le déguster ; après quoi nous buvons l’eau qui a servi à la cuisson. Quel bien-être nous éprouvons en mangeant comme des sauvages les produits de notre chasse, assis devant un feu dont l’éclat est pour ainsi dire masqué par les rayons d’une aurore boréale particulièrement brillante !


CHASSE AUX MOUETTES.
(DESSIN D’A. BLOCH.)

Le lendemain 30 septembre, le voyage ne fut pas aussi facile que la veille. Dans la matinée s’éleva un vent contraire qui fraîchit rapidement. Sous le souffle de cette forte brise, notre canot dérive et bondit sur les vagues d’une manière inquiétante. Il tient bien la mer, il n’embarque pas, mais il est lourd à ramer par vent debout, et le prélart servant de coque laisse pénétrer l’eau de tous côtés. Dans ces conditions nous faisons halte, tirons l’embarcation au sec et sommeillons ; peut-être le vent tombera-t-il dans la soirée. Vers le soir, la brise mollit, comme nous l’espérions, et de suite nous nous embarquons. Bientôt nous voici à Nua, au confluent de l’Ameralikfjord et de l’Ilivdlekfjord.

La soirée est calme et nous atteignons sans difficulté la rive opposée de l’Ilivdlekfjord, au moment où l’obscurité arrive. Là nous