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a travers le grönland.

trouvions alors à la hauteur de 2400 mètres ; si nous devions atteindre de plus grandes altitudes, les observations deviendraient difficiles. Grâce au cercle mobile sur le couvercle de l’instrument, nous pûmes cependant continuer les observations lorsque la pression atmosphérique fut encore plus basse.

Longtemps après seulement nous arrivâmes à la déclivité occidentale du glacier. Pendant des semaines nous avançons à travers une plaine de neige sans fin, chaque jour c’est le même panorama de l’immensité blanche. Cette uniformité fatigue à un point que le lecteur ne peut se figurer. C’est une mer de neige. Le soleil, la neige et nos compagnons, voilà les seules choses que nous voyons dans ce désert. Au milieu de la blancheur sans fin, la caravane seule trace une petite ligne noire. D’horizon en horizon, toujours la plaine neigeuse ; au centre, pas un point sur lequel l’œil puisse s’arrêter. Pour nous orienter il est nécessaire de consulter souvent la boussole, et avec l’aide du soleil, lorsqu’il est visible, nous ne commettons pas d’erreur de direction. Nous connaissions parfaitement notre position et nous savions que de longtemps l’aspect de l’inlandsis ne changerait pas. La surface du glacier était presque plane, accidentée seulement de distance en distance par de longues vagues, à peine visibles au milieu de la blancheur de la plaine. Ces ondulations étaient orientées, pour ainsi dire, dans la direction du méridien.

À la date du 30 août la couche de neige fraîche qui recouvre la vieille neige compacte a une épaisseur de 10 à 12 centimètres. Les jours précédents l’épaisseur de cette nappe n’était pas moindre de 30 centimètres environ ; soulevée par le vent en tourbillons, elle rendait le traînage très pénible.

À partir du 30, la surface de l’inlandsis est unie et glissante comme une glace : nulle part aucune aspérité. Les difficultés du traînage rendent nos étapes généralement courtes : nous parcourons de 11 à 22 kilomètres par jour. Au milieu de l’été la marche aurait été facile sur la neige durcie, comme nous en avions trouvé au début du voyage (les 22 et 25 août). Maintenant cette couche de névé résistant est recouverte de buttes formées de fines particules pulvérulentes amoncelées parle vent : terrain particulièrement mauvais pour le traînage. Les grands froids rendirent cette neige gre-