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les montagnes rocheuses et les glaces rendaient la marche trop laborieuse. »

À mesure qu’on parcourait le pays et que l’on comprenait mieux les renseignements donnés par les indigènes, les Européens établis au Grönland se faisaient une idée plus exacte de l’intérieur de l’île. En 1727, on savait déjà qu’« autour de l’arête centrale du pays s’étendait un immense désert de glace ».

Dès 1728 on songea à employer les ski pour traverser le Grönland. Les instructions données par le roi Frédéric iv au major Paars contiennent le passage suivant : « Quelques jeunes chasseurs norvégiens habitués aux courses sur les ski pourraient reconnaître une partie du pays ».

Ces documents montrent qu’à cette époque on avait une idée assez exacte de l’aspect du Grönland. Aussi ne lira-t-on pas sans un profond étonnement les recommandations adressées au major Paars. On lui enjoignait de ne pas s’épargner pour atteindre l’Österbygd, et s’assurer s’il existait des descendants des anciens colons normands. Il devait se renseigner sur leur langue, leur religion et leur manière de se gouverner. Paars devait en outre étudier la nature du pays, reconnaître si l’on y trouvait des bois, des pâturages, du charbon et autres minéraux, et enfin s’il y vivait des chevaux, du bétail et autres animaux domestiques.

Pour prendre part à l’expédition projetée on envoya du Danemark onze chevaux, un capitaine, un lieutenant, et l’on autorisa Paars à choisir dans la garnison de Godthaab les soldats les plus intrépides.

À peine est-il besoin de dire que cette première expédition n’eut aucun résultat. Les chevaux moururent : les uns pendant la traversée, les autres à Godthaab. Du reste, on avait dû bientôt reconnaître l’impossibilité de traverser à cheval le glacier. Néanmoins, l’année suivante, Paars entreprit une excursion sur l’inlandsis. Le 25 avril 1729, il partit en canot, accompagné du lieutenant Richart, de l’assistant Jens Hiort et de cinq hommes. L’expédition remonta à la voile l’Ameralikfjord. Sur les bords de cette baie, Paars engagea comme guide deux indigènes. Ainsi les premiers explorateurs de l’inlandsis suivirent, pour atteindre le glacier, la même route que nous prîmes