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toujours au nord

avec le saphir le plus pur. Cela nous rappelait les légendes que nos mères nous racontaient dans notre enfance[1].

Le soir, nous campons sur un îlot par 62° 25’ de latitude nord, 42° de longitude ouest de Gr.

Comme d’habitude, les canots sont déchargés et tirés à terre. C’est probablement en cet
un grand isberg à l’est de nagtoralik
(d’après une photographie)
endroit que les légendes de la côte orientale placent le théâtre d’un combat qui eut lieu entre un Européen et un Eskimo[2].

Le lendemain matin (2 août), nous tentons de traverser le fjord dans la direction de l’île Uvdlorsiulit ; de ce côté une masse de glace compacte nous oblige à battre en retraite. Nous nous dirigeons alors vers le chenal ouvert entre l’île et le continent. Et quel n’est pas notre étonnement d’apercevoir sur

  1. On a longtemps affirmé que les glaciers de la côte est du Grönland produisent moins d’isbergs que ceux du littoral occidental. Au cours de leur mémorable expédition, le commandant Holm et le lieutenant Garde ont pu constater la fausseté de cette assertion. D’après les observations toujours très précises de ces voyageurs, tout au moins au sud du 66° de lat. N., des bras de l’inlandsis débouchant sur la côte orientale se détachent au contraire des isbergs en bien plus grand nombre que des glaciers riverains du littoral ouest. Au sud du 66°, on ne rencontre sur cette dernière côte que vingt et un glaciers, tous secondaires. Sur la côte orientale au contraire et seulement jusqu’au 65° il n’existe pas moins de 60 à 70 courants de glace larges de 2 à 5 kilomètres et une centaine d’autres moins importants, mais encore beaucoup plus larges que ceux situés sur le littoral ouest à la même latitude. Les montagnes de glace flottantes les plus grosses rencontrées par ces explorateurs s’élevaient à 60 mètres au-dessus du niveau de la mer et avaient un volume de plus de 6 millions de mètres cubiques. D’autres voyageurs ont vu le long de cette côte des blocs hauts de 10 mètres. (Meddelelser om Grönland, vol. ix, p. 195.)
  2. Meddelelser om Grönland, vol. ix, p. 187. Copenhague, 1889.