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les conquêtes du commandant belormeau

gereux et coupable… Oui, il devait être l’un et l’autre puisqu’elle ne voulait pas l’avouer à sa mère.

Toute la nuit, Valentine se débattit dans ce dilemme ; mais son trouble ne concernait plus que le moyen à prendre pour parvenir à son but. Car elle ne pouvait plus vivre dans cette incertitude ; il lui fallait savoir ce que le commandant avait à lui dire, quel obstacle était entre eux.

Elle vécut, comme une somnambule, les heures qui la séparaient de l’action.

— Tu ne vas pas chez ta cousine, lui demanda sa mère, comme elle s’asseyait dans l’embrasure de la fenêtre, avec son ouvrage…

— Pas aujourd’hui, maman ; je voudrais finir de perler ce réticule.

Quand trois heures sonnèrent, Valentine rangea sa boîte à ouvrage.

— Je n’y vois plus, fit-elle ; maman, je vais à l’église.

— Va, ma fille.

La jeune fille s’enveloppa d’une épaisse mante à capuchon, et s’éloigna d’un pas rapide ; elle entra dans l’église sombre, se jeta à genoux, dans le vieux banc de chêne de sa famille et précipitamment, fiévreusement, se mit à réciter des prières. On eût dit qu’elle essayait, ainsi d’empêcher d’arriver jusqu’à elle, la voix qui lui criait qu’elle courait à sa perte et risquait la paix de son âme. De temps à autre, oppressée, elle murmurait : « Pardon, mon Dieu », mais cette contrition qui ne s’accompagnait pas du renoncement à la faute, n’était pas valable, elle le savait bien.

Quand la demie de trois heures sonna, Valentine se leva, pâle, mais résolue. Elle sortit de l’église et fut surprise de trouver encore tant de clarté au dehors.

Des sentiments contradictoires s’emparaient d’elle ; elle trouvait trop vive la lueur dorée du couchant ; et elle s’effrayait de l’ombre qui, bientôt, emplirait