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les conquêtes du commandant belormeau

— Pas loin d’une heure. Ah ! il ne s’ennuie pas chez nous ce beau monsieur.

Pierre sauta en selle et fit volter son cheval.

— Eh bien, monsieur Pierre ?… remarqua Gertrude abasourdie ; ça ne doit pas vous gêner pour entrer, au contraire.

— Je reviendrai plus tard, dit le jeune homme en poussant sa bête.

— Ah ! c’est bon, alors, reprit la vieille servante, rassurée.

Mais Pierre ne revint pas et quand Minna apprit sa malencontreuse visite, elle se sentit toute inquiète.

Est-ce que vraiment sa jalousie était sérieuse ? Est-ce qu’elle avait eu tort de le taquiner à ce sujet ?

Si elle avait tenu, pendant un quart d’heure, et même moins, son ami d’enfance, en tête-à-tête, elle n’eût pas été embarrassée pour dissiper le nuage, mais si Pierre, boudeur, s’obstinait à la fuir, qu’adviendrait-il de cette fâcherie ?

Pendant les jours suivants, la jeune fille guetta sans cesse, la venue de Pierre Artevelle, mais il ne se montra point.

Sa mère, absorbée par les mille soucis de son intérieur, n’en fit point la remarque, mais plusieurs fois, son père en se mettant à table demanda :

— Pierre n’est pas venu ? Cela me surprend.

Il est vrai qu’il était tombé de la neige en abondance et que la route était défoncée.

Dans cette disposition d’esprit, la jeune fille ne se sentait pas d’humeur à répondre aux propos galants du commandant. Sans affectation, elle esquiva plusieurs de ses visites. Il s’en montra fort déçu. Il sentait bien que cette jolie fille n’était pas très impressionnée par son prestige et qu’elle restait, en sa présence, remarquablement libre de son esprit et de son cœur.