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les conquêtes du commandant belormeau

Ce jour-là, Pierre Artevelle s’était éveillé en dispositions repentantes.

Il se reprochait véhémentement d’avoir agi comme un jeune imbécile avec le commandant Belormeau ; comme une brute avec sa jolie Minna qui n’avait pas commis d’autre crime que de rire de son accès de jalousie subite et de se laisser admirer, avec un peu de complaisance — oui, vraiment, elle y avait mis un peu de complaisance — par le brillant officier.

Mais, enfin, elle comptait dix-huit ans ; on ne pouvait lui demander d’avoir l’expérience et l’austérité d’une matrone. Si, au lieu de se fâcher, il lui avait dit gentiment que l’admiration du commandant lui était désagréable, Minna n’eût pas persévéré dans son attitude peu conciliante.

Ayant, ainsi, médité sur ses torts, Pierre Artevelle avait enfourché son cheval et pris la route de Wattignies.

Il pénétra dans la cour de la brasserie, une demi-heure après le départ de Mme  François et de sa bande. Il mettait pied à terre quand Gertrude parut sur le seuil de la cuisine.

— Bonjour, monsieur Pierre, s’écria la bonne femme ; il y avait longtemps qu’on ne vous avait vu.

— C’est vrai, Gertrude, j’ai eu à faire. Mme  Stenneverck est-elle ici ?

— Non, monsieur Pierre, elle a profité du jour de congé pour emmener les garçons en emplettes ; croiriez-vous que les sabots qu’ils ont eus pour la rentrée des classes, sont déjà usés ? C’est ruineux une bande comme cela !

— Minna est-elle sortie avec eux ?

— Non, monsieur Pierre, répondit Gertrude qui n’y entendait pas malice ; elle est dans la salle à manger et M. le commandant lui tient compagnie.

Pierre devint pourpre et étouffa un juron.

— Est-il arrivé depuis longtemps, reprit-il d’une voix qu’il s’efforçait de rendre indifférente.