Avant que Minna ait pu esquisser un geste, le jeune homme était parti, en claquant la porte.
Persuadée qu’il s’agissait d’une fausse sortie, Minna se mit à rire et continua sa couture.
Au bout d’un quart d’heure, ne le voyant pas reparaître, elle alla jusqu’à la cuisine.
Gertrude, ses lunettes relevées sur le front, écossait des haricots.
— Tu n’as pas vu Pierre, demanda la jeune fille ?
— Ma petite Minna, il vient de partir, d’un air tout encoléré ; je lui ai demandé pourquoi il n’attendait pas notre maître, je ne sais pas, ma foi, s’il a entendu.
Minna demeura tout interdite… Est-ce que ce fou de Pierre avait pris au sérieux son admiration pour le commandant Belormeau ?… Est-ce qu’il n’avait pas vu qu’elle plaisantait ?
— Bah ! fit-elle, avec un sourire confiant, je dissiperai le nuage à notre première entrevue.
Mais Pierre ne reparut pas de la semaine. Il avait, il est vrai, averti François Stenneverck, par un petit mot, qu’il devait s’absenter, et ce n’était peut-être pas un prétexte, après tout.
En revanche, le commandant Belormeau, chaleureusement accueilli par ses hôtes, venait déjà, en intime, dans la maison du brasseur.
Un jeudi, Mme François, ayant à acheter, pour ses fils, des gants et des sabots fourrés, profita du jour de congé pour les emmener faire ses emplettes.
Minna demeura à la surveillance du logis. Le commandant Belormeau se présenta et Gertrude ne crut pas devoir faire de façon pour l’introduire près de sa jeune maîtresse. Celle-ci accueillit aimablement son visiteur.
Elle ne se sentait nullement troublée par le tête-à-tête et avait quelques velléités de punir Pierre de son mauvais caractère.