— S’il en est ainsi, dit-elle, je ne puis regretter les jours de tristesse.
— Non, Minna ; nous nous aimerons mieux, plus fortement, plus saintement, en époux conscients de leur mission sur la terre.
— Je suis heureuse, ami, de vous entendre parler ainsi.
— Oui, Minette, mais en ce qui vous concerne, ne changez point votre manière, elle me plaît infiniment.
— Ah ! Monseigneur, j’attendrai votre permission pour devenir austère.
— Austère ! Vous ! J’essaye de me représenter ma femme, avec des lunettes, des rides, des moustaches, peut-être ?…
— Hélas ! cela est arrivé à d’autres.
— Jamais votre minois ne connaîtra de semblables avatars.
— Confiance flatteuse qui doit vous inciter à la charité ; travaillons au bonheur de Valentine et de Philippe.
— Je ne demande que cela ; parlez et vous serez obéie. Il faut maintenant que je vous quitte ; je ne sais, hélas ! quand je pourrai revenir ?… Peut-être bien pas avant demain.
— Je consens à attendre jusque-là.
— Donnez-moi des violettes pour parfumer mon chemin ?
— Je vous donnerai volontiers toutes celles que vous avez cueillies et qui semblent, les pauvrettes, avoir passé sur l’échafaud…
— Qu’importe, Minna, au fond de ma poche, elles en verront bien d’autres.
— Prenez, les voici.
— Minna, vous allez bien me donner autre chose ?
— Et quoi donc ?
— Un pauvre petit baiser.
— Non pas, monsieur ; vous n’aurez, ce soir, que les fleurs que vous avez décapitées.