Page:NRF 8.djvu/964

Cette page n’a pas encore été corrigée

95^ LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

J'ai, pour te revêtir, dépouillé tous mes frères !

J'ai, pour te joindre, marché sur eux !

Ah ! je comprends ce masque implacable que prend parfois, dans la mort, le visage de ceux que la vie a frustrés, cet air de rancune qui semble nous dire : " Tu me le paieras éternellement ! "

��IX

��Mais qui peut ouvrir d'assez larges bras pour étreindre tous les maux de la terre, avec une sympathie aussi vivante, aussi charnelle, aussi enracinée aux entrailles que celle qui m'incline à dorloter tes chagrins ?

��Comme un adoucissement à toutes les piqûres que font les vaines paroles aux âmes solitaires, je t'offre mon silence.

Si, loin de peser sur tes rêveries, ma présence muette leur imprime une allure plus aisée, un mouvement plus rapide, si elle ajoute à leur mystère, alors oui tu m'aimes.

Viens, nous écouterons ensemble le grondement sourd du temps qui se précipite autour de nous, en nous, et dans cet être étrange, né de toi et de moi, cette création double que l'amour compose, une seconde, avec les corps mêlés des amants.

�� �