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NOTES 937

la force : " Pour gagner la vie idéale, non seulement on risque volontiers sa vie ; mais on ne conquiert fortement la vie idéale qu'en sacrifiant celle-ci. L'homme est homme à ce prix, et n'est pas bête. Perdre la vie pour la sauver : il n'y a pas de loi plus belle ni plus clairement écrite dans le cœur des héros. Et c'est en quoi, secrets ou non, les héros sont les hommes de gloire sur tous les autres. " {Paradoxe de la gloire).

Une ardeur positive jusque dans le refus ; une foi humaine si libre et si farouche qu'elle n'a point de commune mesure avec l'espérance du bonheur, si abondante qu'elle suffit à nourrir tout l'homme ; une intuition de la vie, une expérience du monde, qui, toutes frémissantes, se passent cependant du contact, et, pour ainsi dire, de l'intermédiaire des corps ; un amour jamais recru de ne trouver d'appui qu'en soi-même, ni d'aiguillon qu'en ce désir, qui le jette à la connaissance comme à la volupté, " de quel air ardent et désabusé "... Telles sont les énigmes d'un grand esprit. " J'ai toujours été seul. Et je le reste, dit-il. Et plus je suis seul, plus j'ai pitié de ce monde. " C'est peut-être à son retranchement, à son exceptionnelle " position ", à ce que j'appellerais sa " sagesse " s'il n'était encore un homme jeune, que Suarès doit les vues si droites si peu communes et d'une si neuve autorité, qu'il a prises sur la nature, sur les hommes, et sur les œuvres des hommes.

Ouvrez le livre. Voyez comment l'auteur y parle de Don Juan. Considérez les portraits de Pétrone., de Baudelaire, de M. Ingres et de Caligula. Relisez les chapitres : Shakspere et Racine, Othello et Zacconi. Il y a là des accents qui sont uniques, et qui me paraissent bien profonds.

J. C.

L'ÉVOLUTION MORALE DE GŒTHE. I. Les années de libre formation (1749- 1794.), P^'^ Henri Loiseau.

Pour ceux que la pensée de Gœthe intéresse encore plus que

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