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908 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

de strophe en strophe, l'effet des règles s'en trouve annihilé. Dans les Chants de la Vie Ardente, avec moins de rigueur formelle, le vers montrait une carrure plus robuste et sonnait plus classi- quement. Oui, en dépit du vouloir de l'auteur, la Romance de VHomme nous donne l'impression d'obéir à une technique à la fois monotone et relâchée.

Voici le vieux soleil qui meurt comme un cyclone De feu, comme un soupir de trompe grave et jaune. Au ras de la forêt et du remblai du train Qui fie, et dont la fuite en trombe nous étreint Le cœur,

" Le cyclone — de feu ", " le train — qui file ", la fuite qui " nous étreint — le cœur ! " En quatre vers, trois rejets si hardis, voilà au moins deux hardiesses de trop qui neutralisent la première. Mais M. de Bouhélier va devant lui et s'en remet à sa facilité pour réparer par dix vers mieux venus, les erreurs des vers qui précèdent. Il a l'éloquence abondante et l'image aisée. Il va donc. — On ne peut aller plus loin de Racine, ni se rapprocher davantage, au contraire, de la manière de Hugo, dans les plus déplaisants de ses procédés et sans l'entrain et la maîtrise variée du génie, — c'est Hugo à travers Mendès. Pour le rhythme et la déclamation, M. de Bouhélier nous ramène au sous-romantisme. Or je ne suis pas sûr que par le sentiment et la pensée il s'en sépare beaucoup plus.

Les idées qui se trouvent le plus souvent mêlées dans la trame assez lâche de ces poèmes, sont les idées de damnation, de rédemption et de pitié, les thèmes les plus vulgaires de Hugo, relevés d'un peu de piment à la Baudelaire. Je sais bien que M. de Bouhélier prétend les dominer par un appel vital, par une exaltation de l'action et de la passion qui tentent de faire contre-poids à cette morbidesse humanitaire. Mais c'est en vain, il a beau sonner la trompette, le malheur de la prostituée lui semblera toujours, quoiqu'il en ait, un sujet neuf.

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