Page:NRF 8.djvu/891

Cette page n’a pas encore été corrigée

CHRONIQUE DE CAERDAL 883

et non barbare ; qui, même hors de soi, semble se posséder ; et qui a une si haute mine, enfin, de grand seigneur, de prince rebelle et de Bradamante guerrière.

Le devoir est le nom qu'il donne à la violence que la volonté exerce sur elle-même. Elle est le dernier excès. Et c'est aussi l'honneur. Car l'hon- neur est la passion du devoir. Faire son devoir, pour Corneille, ce n'est pas faire ce que tous les hommes sont plus ou moins tenus de faire ; mais ce que personne ne fait.

Corneille partage le monde en deux espèces ou deux moitiés : lui, le héros qui veut, et dont la volonté se confond sans délai et presque sans combat, avec l'action même ; et tout le reste de l'univers, qui obéit à d'autres intérêts. Et des deux moitiés, ce n'est pas lui, l'homme de volonté, qui est la moins forte.

Le héros à la Corneille est ivre de soi-même. Et Corneille est ivre de son héros. 11 a la sagesse de la volonté immuable, cette raison qui déduit avec ordre et implacabilité. A la réflexion, elle semble un délire d'orgueil ; et certes, il n'y eut jamais orgueil semblable. Mais comme tous les héros de Corneille y sont plongés, d'abord il n'y paraît pas.

Ivre de volonté. Corneille veut contre les lois communes. C'est sa vertu. Il veut contre tout ce

�� �