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JULIETTE LA JOLIE 83

sa cousine, mais tout de même !... Elle qui mène son vieux par le bout du nez, avec lui si vous voyiez comme elle file doux !

Juliette ne rougissait pas. Mais il lui arrivait de pâlir. Elle n'était ni farouche ni bégueule ; il s'étonnait de trouver dans cette petite ville une aussi jolie fille qui avait tou- jours la riposte prête. Mais il ne laissait rien paraître de son étonnement. Quelquefois il cessait de blaguer pour chantonner des airs de romances que personne ici ne connaissait et qui pourtant sont beaux.

— Si on allait boire du lait aux Mouilles ? dit Marcelle. On aurait pu en boire d'aussi bon chez soi, de ce lait

qu'on va chercher vers sept heures du soir, quand les vaches sont tirées, chez ceux dont c'est le métier d'en vendre. Mais pour Marcelle, boire du lait à la maison n'était pas suffisant : il lui fallait un décor de circonstance, une ferme par exemple. Tout de suite le lait lui parais- sait meilleur. Plusieurs fois déjà elle était allée aux Mouilles avec Juliette. Il y avait les villages d'alentour, plus sauvages, mais elle les trouvait trop éloignés. Elle n'avait pas l'habitude de marcher longtemps, et, avec ses bottines à hauts talons, presque à chaque pas elle était obligée de se retenir, dans les sentiers ravinés, à quelque branche. Heureusement Cougny était toujours là pour la tirer d'embarras, " fourré dans ses jupes comme un morveux, " disait-elle. Quant à y aller par les routes, c'était mourant. On accepta d'enthousiasme. Mais Cougny n'aimait pas le lait : la moindre absinthe faisait mieux son affaire. Il dit :

— Allez donc, les enfants. Et tâchez de ne pas vous saouler !

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