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Il est curieux de chercher quel esprit gouverne la pensée, sinon l’action, de cette admirable époque. Plus j’ai lu Gondi, Pascal, La Rochefoucauld, Saint Evremond, Molière et La Fontaine, plus j’ai senti l’invisible présence de Montaigne. 11 ne se montre pas ; il se cache plutôt ; mais il est au fond. Tous ne l’avouent point ; et la plupart s’en défendraient, peut-être. Mais ils le lisent tous, et tous s’en pénètrent.

Montaigne n’a pas été l’homme de son temps. Il l’est bien autrement de l’âge qu’il a instruit, après sa mort, et celui que je veux dire. Bref, Montaigne est l’apôtre de l’individu. Et la Fronde est la révolution des individus : elle l’est jusqu’à la négation de toute politique.

Ceux que Montaigne ne nourrit pas, ils vont se nourrir de Descartes. Or, moins les mathématiques, sinon de Montaigne, d’où vient Descartes ? A la belle heure de 1630, la science, c’est la recherche, et rien de plus. La curiosité des esprits est merveilleuse à Paris, et en province. Les salons sont de ce temps là ; et d’abord, l’Académie. La chambre du P. Mersenne et le cabinet de Roberval ont vu naître l’académie des sciences. Pour répondre à Galilée, à Kepler et un peu plus tard à Huygens, Gassendi ne quitte pas sa petite ville, et Fermat ne sort pas de Toulouse.

Quand la mécanique du monde serait toute mise en nombre, qui voudra se satisfaire de cette arithmétique