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SEPT HOMMES 83 I

corrections que le rêve apporte à la notion complexe des faits que l'état de veille nous donne.

Car j'aflfirme encore que, du songe, se dégage l'épilogue, la conclusion nécessaire de la réalité. Le songe en fait toucher le fond, étant plus léger, plus fluide que cette réalité, opportune et extérieure.

Je recueillis donc mes rêves, réservant pour plus tard de compulser les petits récits que j'en notais et d'y chercher des remarques ou des lois curieuses. Qu'on ne s'en étonne pas : il me semble aussi profitable de rédiger les rêves de notre pensée libérée par le sommeil que de chasser, dans les ruines des civilisations disparues, les inscriptions que laissèrent d'antiques voyous, à hauteur d'homme, sur les murs des maisons.

Les premières nuits, cela n'eut rien que de très amusant. Je m'éveillais une fois, deux fois au plus. J'allumais ma bougie et transcrivais en notes exactes les détails de mes songes.

Gais, sautillants, parfaitement naïfs, ils ne rimaient pas à grand'chose et j'aurais pu craindre de perdre mon temps à rédiger de tels enfantillages si, au bout de quelques semaines, une modification importante ne s'était produite dans l'économie de mon sommeil : mes rêves se multi- pliaient.

Cédant, sans doute, aux sollicitations des veilles, mon esprit partait plus fréquemment, la nuit, en des imagina- tions merveilleuses que je rédigeais avec méthode. Une prompte fatigue en résulta. Car les songes augmentaient, en nombre et en durée. Du minuit à l'aube, j'en faisais cinq, sept, dix même, et il me fallait parfois une demi-heure pour établir le rendu-compte de ce que j'avais imaginé en

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