788 LA ISrOUVELLE REVUE FRANÇAISE
d'être insuffisante. Je ne dis pas que cela lui arrive par accident, que c'est en elle un défaut, un insuccès. Mais elle se propose formellement de ne pas suffire. Elle cesserait d'être elle-même, si elle contentait l'esprit. — En effet non seule- ment elle rend raison d'un fait, mais encore il faut que d'elle on rende raison. Elle n'est scientifique que si elle a besoin à son tour d'une explication ; il faut que le problème qu'elle éteint, renaisse à propos d'elle. Le savant explique par les causes ; et il définit la cause : ce qui ressemble à l'effet, ce qui est de même nature, donc ce qui se comporte de la même façon ; la cause a les mêmes besoins, les mêmes infirmités que l'effet ; elle est un effet, à son tour ; il lui faut, pour ne pas tomber, l'appui d'une reprise, d'un nouveau départ de l'esprit ; fet le savant ne l'accepte qu'à cette condition qu'elle soit chancelante et incapable de se soutenir seule. En somme l'explication scientifique — c'est un reproche qu'on lui a souvent adressé — au lieu de répondre à la difficulté en se plaçant en face d'elle et en lui faisant équilibre, tâche de l'en- traîner, de réconduire. Elle ne répond pas, à proprement parler, au problème, mais elle s'ap- proche tout contre lui et se présente comme une marche plus basse oia il ne peut manquer de descendre ; elle le fait basculer et glisser ; au lieu de l'assumer, elle met son poids à profit pour le déplacer et le déporter. Car, sitôt qu'elle l'a reçu
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